Impacts des conditions météorologiques sur la productivité
Les conditions météorologiques peuvent jouer un rôle important dans la productivité du travail au chantier. En règle générale, la productivité est affectée positivement par le beau temps et négativement par le mauvais temps. Les impacts les plus importants se font généralement sentir sur les activités qui prennent place à l’extérieur, et plus particulièrement sur les opérations susceptibles d’être affectées par les conditions météorologiques telles que les travaux de terrassement, de bétonnage, etc., vu que des mesures comme l’installation d’abris temporaires et le chauffage peuvent être utilisées pour réduire ou éliminer les répercussions des conditions météorologiques sur les travaux intérieurs (bien que cela entraîne souvent des coûts additionnels).
Dans cet article, nous traitons de la perte de productivité due aux conditions météorologiques défavorables. Nous y examinons diverses études de l’industrie portant sur le sujet afin d’informer le lecteur de l’application souvent limitée de ces études, ainsi que des pièges inhérents à des applications erronées de celles-ci.
Comment les conditions météorologiques ont-elles une incidence sur la productivité?
Les conditions météorologiques peuvent impacter la productivité au chantier de diverses manières. La température (froide ou chaude), l’humidité et les précipitations sont autant de facteurs qui ont une incidence non seulement sur la productivité de la main-d’œuvre directe, mais aussi sur la productivité et l’efficacité des équipements, ainsi que la composition et l’adéquation des matériaux.
Impacts du froid et de la chaleur sur la main-d’œuvre
La productivité de la main-d’œuvre peut être considérablement affectée par des conditions météorologiques défavorables. Le temps froid comme le temps chaud peuvent avoir des impacts psychologiques et physiologiques.
Les travaux réalisés par temps froid peuvent être impactés par des blessures liées au froid (engelures, hypothermie, potentiel accru d’accidents), une dépression ou une baisse de moral, des erreurs de jugement, une diminution générale de la qualité du travail, des difficultés de manipulation tactile, des plaintes et des arrêts de travail imprévus (par exemple pour chercher à se réchauffer), etc.
Les travaux réalisés par temps chaud peuvent être impactés par des blessures liées à la chaleur (coups de chaleur, coups de soleil, épuisement par la chaleur, déshydratation), de l’irritabilité ou une baisse de moral, des erreurs de jugement, de la léthargie, une diminution générale de la qualité du travail, une augmentation des pauses pour l’eau ou pour s’abriter du soleil, ou d’autres arrêts de travail imprévus, etc.
Motricité fine et globale
En ce qui concerne les tâches exécutées par la main-d’œuvre directe, il est important de reconnaître que les conditions météorologiques affectent différemment la motricité fine et la motricité globale.
Le froid peut rendre plus difficiles et plus longues les tâches faisant appel à la motricité fine, telles celles qui requièrent la dextérité des doigts et des mains et d’autres manipulations tactiles, tout en n’ayant que peu ou pas d’effet majeur sur les tâches faisant appel à la motricité globale, telles que la marche, le soulèvement d’objets, etc.
Inversement, le temps chaud peut rendre les activités impliquant la motricité globale plus éprouvantes, tout en n’ayant que peu ou pas d’impacts négatifs sur celles impliquant la motricité fine.
Conditions du chantier et autres facteurs environnementaux
Les fortes précipitations ou chutes de neige peuvent présenter un danger en raison de la faible visibilité ou des conditions glissantes, ainsi qu’entraver l’avancement de certaines opérations en raison de la nécessité de déglacer, de déneiger ou de pomper l’excès d’eau (ce qui peut également entraîner des coûts supplémentaires).
En fonction de la gravité des conditions météorologiques, il peut s’avérer nécessaire de suspendre les travaux.
Il existe également d’autres façons, moins évidentes, dont les conditions météorologiques ou saisonnières peuvent affecter la productivité du travail au chantier. Au Canada, il fait plus sombre plus tard le matin et plus tôt le soir pendant l’hiver, ce qui raccourcit les journées. Les conditions météorologiques peuvent avoir des impacts sur les activités qui font intervenir des matériaux susceptibles d’être affectés par les conditions environnementales ou la température, comme le béton, en limitant le moment et la manière dont les travaux peuvent être exécutés. Les conditions météorologiques peuvent également avoir des impacts sur l’état des matériaux in situ. Par exemple, le sol destiné à être excavé ou utilisé comme remblai peut geler s’il est exposé à des températures froides, ou être saturé s’il est exposé à la pluie, ce qui peut le rendre inadéquat pour l’utilisation prévue.
Considérations pour les maîtres d’ouvrages et les entrepreneurs
Dans la mesure où les conditions météorologiques sont prévisibles et raisonnables, elles doivent être prises en compte par les maîtres d’ouvrages et les entrepreneurs avant la construction.
Les maîtres d’ouvrages devraient par exemple tenir compte des conditions météorologiques lorsqu’ils établissent des jalons contractuels, en particulier si les travaux devront se dérouler pendant des périodes hivernales ou des mois d’été très chauds.
Les entrepreneurs, pour leur part, devraient tenir compte de la période pendant laquelle les travaux se dérouleront lorsqu’ils déterminent leur prix de soumission. Les conditions météorologiques doivent également être intégrées par les entrepreneurs lors de l’élaboration de l’échéancier du projet, de manière à ce que le potentiel de baisse de productivité pendant certaines périodes ne risque pas d’être omis dans la détermination de la durée des activités et des ressources nécessaires. Dans la mesure du possible, les entrepreneurs devraient également s’efforcer de planifier les opérations susceptibles d’être affectées par les conditions météorologiques en privilégiant les périodes météorologiques optimales.
En cas de retard dans l’exécution du projet, il est possible que les travaux soient reportés à une autre saison que celle prévue à l’origine. Dans de tels cas, malgré une planification appropriée, les activités peuvent devoir être réalisées dans des conditions qui ne sont pas optimales. Dans une telle situation, un entrepreneur pourrait être en mesure de faire une réclamation si la cause du retard n’est pas de sa responsabilité. Une discussion plus détaillée de ce sujet dépasserait le cadre de cet article.
Il est important de noter que le simple fait d’avoir dû faire face à des conditions météorologiques défavorables ne suffit pas nécessairement à justifier une réclamation. Il est donc impératif d’établir le lien de causalité entre les conditions météorologiques et les impacts allégués. La planification de l’entrepreneur doit être prise en considération lors de l’évaluation des dommages ou du bien-fondé. Par exemple, il ne serait pas indiqué de soumettre une réclamation pour des travaux réalisés en conditions hivernales s’il avait initialement été planifié que ceux-ci seraient exécutés pendant l’hiver. Il importe également d’examiner si les travaux effectués ont réellement été exposés aux conditions météorologiques alléguées comme ayant été défavorables. Par exemple, les travaux intérieurs peuvent ne pas être affectés par les intempéries de la même manière que d’autres activités. Il faut enfin aussi considérer si des mesures comme des vêtements chauffants, des matériaux résistants aux intempéries (mélanges de béton, membranes, etc.), du chauffage ou l’installation d’abris temporaires ont été mises en œuvre (ou auraient pu l’être) pour atténuer ou éliminer les impacts des intempéries.
Cela dit, lorsque des conditions météorologiques défavorables imprévues surviennent durant l’exécution d’un projet, il peut être nécessaire pour les entrepreneurs de mesurer la perte de productivité que celles-ci ont entraînée.
Mesure de la perte de productivité
En termes simples, la productivité se définit comme un rapport entre les facteurs de production, ou intrants, et les unités produites, ou extrants (heures travaillées ou sommes dépensées). Voici quelques autres mesures courantes de la productivité :

Il existe plusieurs méthodes différentes pour mesurer la perte de productivité, certaines étant préférables à d’autres.
L’Association for the Advancement of Cost Engineering International (AACEi) a publié une pratique recommandée intitulée «Estimating Lost Labor Productivity1 », qui décrit les méthodes courantes de mesure de la perte de productivité par ordre de préférence, soit :
-
- Études spécifiques au projet (« mètre-étalon »/« période-étalon », ou Measured Mile)
- Études de comparaison de projets
- Études spécialisées de l’industrie
- Études généralistes de l’industrie
- Méthodes basées sur le coût (coût total)
- Impacts de la productivité sur l’échéancier
L’American Society of Civil Engineers (ASCE) a également publié une norme intitulée « Identifying, Quantifying and Proving Loss of Productivity2 » qui classe de la même manière les méthodes de mesure de la perte de productivité, bien que de manière plus générale. Une fois de plus, le mètre-étalon y est indiqué comme la méthode à privilégier, suivi par les études de l’industrie, et enfin par la méthode du coût total. Les sections suivantes présentent la méthode la plus recommandée, soit celle du « mètre-étalon », ainsi que d’autres études spécialisées de l’industrie portant sur les conditions météorologiques.
Mètre-étalon (ou Measured Mile)
La méthode de mesure la plus probante est sans conteste celle du « mètre-étalon ». Elle consiste à comparer la productivité enregistrée en périodes non perturbées ou « normales » à celle qu’on observe lorsque la productivité est affectée par les facteurs en cause. Fondée sur des données réelles, cette méthode tient spécifiquement compte de lacunes du maître d’œuvre et/ou d’erreurs d’estimation. Le calcul des pertes est basé sur l’écart entre les taux de productivité. Comme l’indique l’AACE dans sa pratique recommandée:
Le calcul du « Measured Mile » est préconisé, car il ne prend en compte que l’effet réel des impacts allégués et élimine ainsi les litiges sur la validité des estimations de coûts, ou sur les facteurs qui peuvent avoir affecté la productivité, mais qui ne découlent d’aucun défaut de la part du maître de l’ouvrage3.
La Figure 1 montre un exemple hypothétique d’application d’une analyse de type mètre-étalon.

Figure 1 - Exemple d’une analyse de type « mètre-étalon »
En règle générale, la méthode du mètre-étalon, ou une version modifiée de celle-ci, devrait être utilisée pour calculer la perte de productivité. Malheureusement, il peut se révéler impossible d’y avoir recours dans les cas suivants :
- lorsqu’on ne dispose pas des données nécessaires à l’analyse détaillée de la productivité ou que les données disponibles ne sont pas fiables;
- quand plusieurs causes ont contribué à la perte de productivité, mais qu’une seule peut donner lieu à une indemnisation; ou
- lorsqu’il faut inclure la perte de productivité dans l’évaluation quantitative d’un ordre de modification avant l’exécution de la modification (détermination préalable des coûts).
Faute de devoir se tourner vers des estimations « à vue de nez », le recours à des études de l’industrie portant sur la cause en question pourrait bien être l’un des seuls autres moyens de quantification permettant d’évaluer une perte de productivité spécifique. Cependant, celles-ci ne devraient être utilisées qu’avec une grande prudence.
Études issues de l’industrie
Étant donné que les conditions météorologiques peuvent avoir des impacts significatifs sur la productivité d’un projet, de nombreuses études ont été menées au fil des ans pour tenter d’évaluer ces impacts potentiels. Les études réalisées montrent une corrélation claire – quoiqu’avec un degré plus ou moins élevé d’adéquation – entre les conditions météorologiques (en termes de température, d’humidité, de précipitations, de vent, d’éclairement, etc.) et la productivité. Toutefois, la plupart de ces études remontent aux années 70 et 80, voire plus tôt.
Si l’on trouve dans plusieurs publications et articles plus récents d’intéressants commentaires généraux sur les impacts des conditions météorologiques sur la construction, il est regrettable qu’il semble n’y avoir que peu ou pas de nouvelles recherches spécifiquement consacrées à ce sujet. Il est donc important de garder à l’esprit que les résultats des études plus datées ne refléteront pas comment les données climatiques ont changé au fil des années, ni l’utilisation de technologies et de pratiques émergentes plus récentes qui contribuent assurément à atténuer les impacts liés aux conditions météorologiques sur la productivité démontrés par les études sur le sujet. Par exemple, les vêtements chauffants peuvent atténuer certains des impacts qui affectent la main-d’œuvre directe travaillant dans des environnements froids, tandis que l’utilisation de certains matériaux (tels les mélanges de béton adaptés au temps froid) peut rendre possible l’exécution d’opérations susceptibles d’être affectées par les conditions météorologiques dans des conditions qui seraient sans cela défavorables.
Quoi qu’il en soit, certaines études4 qui demeurent souvent citées dans l’industrie ont été réalisées par les organisations et chercheurs suivants, et sont résumées dans les sections subséquentes :
- National Electrical Contractors Association (NECA)
- U.S. Army Corps of Engineers
- Koehn and Brown
- U.S. Army Cold Regions Research and Engineering Laboratory
National Electrical Contractors Association (NECA)5
En 1974, la NECA a réalisé une étude intitulée « The Effect of Temperature on Productivity », qui a été republiée en 2004. Cette étude évalue les effets de la température et de l’humidité sur la productivité, spécifiquement pour les travaux d’électricité.
La productivité de deux électriciens (journaliers) installant des prises doubles sur des panneaux de travail a été mesurée sous différentes combinaisons de température et d’humidité relative.
L’étude de la NECA a révélé qu’en général, le rendement des travailleurs diminuait à des températures supérieures à 80°F et inférieures à 40°F, et que si l’humidité ne jouait pas un rôle significatif entre 30°F et 80°F, elle entraînait une réduction importante de la productivité à des températures élevées. Il a été constaté que la productivité diminuait avec une humidité élevée à des températures plus froides; cependant, c’est la température qui joue un rôle beaucoup plus important dans des conditions très froides. La Figure 26 présente une compilation des différentes courbes qui relient la productivité à la température effective et à l’humidité relative (HR).

Figure 2 - Courbes de productivité adaptées à une humidité relative de 20 à 90 pour cent
L’on notera que l’étude de la NECA présente la productivité sous forme de tableaux et de graphiques.
Bien que l’étude elle-même n’ait pas directement évalué l’incidence du refroidissement éolien sur la productivité, des recommandations d’adaptation au refroidissement éolien y sont fournies.
Dans l’ensemble, l’étude de la NECA donne un aperçu de la manière dont le rendement au travail peut être influencé par l’interaction de la température et de l’humidité, et pourrait être utilisée comme outil pour ajuster les estimations, pour la planification et l’ordonnancement, ou au soutien de demandes de prolongation du délai d’exécution ou de dommages-intérêts réclamés déterminés par d’autres moyens. Néanmoins, cette étude n’est basée que sur deux journaliers électriciens effectuant des tâches de « motricité fine », et ne doit donc pas être appliquée aveuglément ou directement à toutes les tâches ou à tous les métiers.
U.S. Army Corps of Engineers7
En 1984, une étude intitulée « AFCS (The Army Facilities Components System) Climactic Zone Labor Adjustment Factors » a été réalisée et publiée pour le U.S. Army Corps of Engineers, Construction and Research Laboratory. L’étude avait pour but d’améliorer, de mettre à jour ou de valider un ensemble de facteurs d’efficacité et d’ajustement de la main-d’œuvre précédemment développés en 1971. Les données utilisées ont été extraites d’études antérieures contenant des données sur la productivité de différents corps de métiers (notamment la maçonnerie, les travaux d’électricité et les travaux sur le fer et l’acier) en provenance de différents pays. Les résultats de l’étude ont été résumés dans divers tableaux, dont ceux présentant les facteurs climatiques de productivité de la main-d’œuvre par zone climatique et les facteurs d’ajustement de la main-d’œuvre par zone climatique, ainsi qu’une courbe de régression normalisée de la température en fonction de la productivité. Cette courbe de régression est présentée à la Figure 38.

Figure 3 - Courbe de régression de la température en fonction de la productivité
Comme le montre la Figure 3, la productivité est affectée en fonction de la température effective, diminuant à la fois pour les conditions froides et chaudes. Selon cette étude, la productivité peut être estimée à moins de 50 % à environ -10°F, et continue de chuter à mesure que la température effective diminue. De même, elle diminue également à environ 110°F, et continue de baisser à mesure que la température effective augmente.
Les facteurs d’ajustement de la main-d’œuvre présentés dans l’étude ont été critiqués pour leur application trop générale, car ils ne ciblent pas une activité ou un corps de métier spécifiques, et les régions ou pays qu’ils englobent sont très vastes9.
Koehn et Brown10
En 1984, Enno Koehn et Gerald Brown ont mené une étude basée sur des données historiques provenant de plusieurs études antérieures afin d’évaluer les effets de la température et de l’humidité sur la productivité dans des environnements chauds et froids. L’analyse statistique a été réalisée sur la base de données de productivité pour les activités d’excavation, de montage, de maçonnerie et de charpenterie, les travaux d’électricité, ainsi que pour les manœuvres. Les données de température analysées ont été utilisées pour élaborer deux équations pour le calcul des facteurs de productivité (l’une pour le temps froid et l’autre pour le temps chaud).
Ces équations sont destinées à être utilisées pour estimer ou calculer la productivité liée aux conditions météorologiques pour l’ensemble d’un projet, sur la base des conditions climatiques de l’emplacement du chantier. Toutefois, les auteurs mettent en garde sur le fait que les résultats de cette étude peuvent ne pas être applicables ou devoir être ajustés en fonction de certains facteurs liés à l’équipe et à la complexité des tâches effectuées. Des préoccupations ont également été soulevées au sein de l’industrie concernant la manière dont les données provenant des différentes sources ont été traitées et normalisées, ainsi que sur la possibilité que la combinaison de données provenant de différentes études portant sur différents corps de métier pourrait être trompeuse11.
U.S. Army Cold Regions Research and Engineering Laboratory12
En 1986, un « facteur d’environnement froid » a été mis au point pour le U.S. Army Cold Regions Research and Engineering Laboratory, afin d’indiquer les impacts sur la productivité et l’efficacité d’environnements froids ou de conditions froides sur le travail extérieur, tant pour la main-d’œuvre (tâches manuelles) que pour l’équipement. Cette analyse, publiée dans un rapport intitulé « Effect of Cold Weather on Productivity », s’appuie sur des données provenant de diverses enquêtes de l’industrie de la construction et de l’armée. Ainsi, un large éventail d’activités et de types de travaux ont été pris en compte dans cette étude, y compris, mais sans s’y limiter, les travaux de battage de pieux, de terrassement, de construction et de réparation de pistes d’atterrissage ou de routes.
L’étude de l’armée américaine a pris en compte plusieurs variables lors de l’élaboration des facteurs d’environnement froid, notamment la température, la vitesse du vent et l’intensité des précipitations. À partir des données utilisées, des nomogrammes ont été élaborés pour estimer les facteurs d’environnement froid pour les tâches manuelles et le rendement de l’équipement.
À titre de mise en garde, l’étude prévient que les facteurs d’environnement froid donnent une indication de l’effort requis pour effectuer une activité et de l’effet probable du froid sur cette activité dans des conditions données, mais que des essais sur le terrain seraient nécessaires pour déterminer les impacts réels et la nécessité de modifier ces facteurs. En outre, du fait que les facteurs ont été élaborés sur la base d’un large éventail d’équipements et de tâches, ils devraient être considérés comme « au mieux, des valeurs indicatives typiques13».
Les études de l’industrie – à n’utiliser qu’avec précaution
Les entrepreneurs et leurs conseillers en réclamations s’appuient souvent sur des études de l’industrie pour démontrer la perte de productivité. Cependant, dans de nombreux cas, les études invoquées n’ont que peu de rapport avec la situation spécifique examinée. En fait, il se peut qu’ils n’aient jamais consulté l’étude originale et se soient simplement fiés à un seul graphique, reproduit dans un livre ou par une association professionnelle.
Par exemple, une étude peut indiquer une baisse de productivité due à certaines conditions météorologiques – comme le vent – et fournir des facteurs associés pour estimer cette perte. Cependant, si ces conditions météorologiques n’ont, dans les faits, pas eu d’impacts matériels sur les travaux, il ne serait pas approprié de fonder un calcul de perte de productivité sur cette étude.
De même, si une étude sur les travaux de mécanique/d’électricité était par exemple utilisée pour évaluer la perte de productivité d’opérations de terrassement, cette application ne serait pas non plus appropriée. Il est donc d’une importance capitale que toute étude à laquelle il est fait référence ou sur laquelle on s’appuie, en l’absence d’informations spécifiques au projet, soit examinée dans son entièreté, bien comprise, et pertinente à la situation.
Les meilleures pratiques préconisent également de démontrer qu’il n’était pas possible d’utiliser la méthode du mètre-étalon pour évaluer la perte de productivité avant d’avoir recours à des études de l’industrie14.
En guise de conclusion
Comme le mettent en évidence les études examinées plus haut, il est largement reconnu que les conditions météorologiques défavorables peuvent impacter la productivité d’un projet de construction de diverses manières. Les études de l’industrie offrent un aperçu intéressant de la façon dont les différents facteurs influencent la productivité et le rendement au chantier. Elles peuvent également servir d’outil pour distinguer la perte de productivité causée spécifiquement par les conditions météorologiques de celle due à d’autres facteurs.
Cela dit, on ne saurait trop insister sur le fait que la meilleure source de données pour calculer les impacts des conditions météorologiques sur la productivité (ou toute perte de productivité) demeure les données réelles du projet. Les études généralistes de l’industrie ne devraient jamais remplacer les méthodes d’analyse spécifiques au projet, y compris celle du mètre-étalon, lorsque leur utilisation est possible. Si l’on doit recourir à une étude de l’industrie pour évaluer la perte de productivité due aux conditions météorologiques, il est de la plus haute importance que celle-ci ne soit pas appliquée aveuglément. Elle devrait plutôt être intégralement examinée et comprise, afin de s’assurer de son adéquation avec les travaux en question, et dans la mesure du possible, que des ajustements y soient apportés pour tenir compte des circonstances réelles du chantier.
À mesure que l’industrie continue de changer et de se moderniser en adoptant de nouvelles technologies, il sera intéressant de voir quelles nouvelles tendances et quels résultats seront révélés par la recherche future sur les conditions météorologiques et leurs impacts sur la productivité.
- AACE International. “Estimating Lost Labor Productivity in Construction Claims,” AACE International Recommended Practice No. 25R-03: TCM Framework: 6.4 – Forensic Performance Assessment, 2004, p. 8-9.
- American Society of Civil Engineers (ASCE). “Identifying, Quantifying, and Proving Loss of Productivity,” ASCE Standard ANSI/ASCE/CI 71-21, 2021, p. 17-20.
- AACE International. “Estimating Lost Labor Productivity,” 2004, p. 11. [Traduction libre de Revay]
- Il est important de noter qu’il ne s’agit pas ici d’une liste exhaustive, comme d’autres études évaluant les effets des conditions météorologiques sur la productivité et qui couvrent différents secteurs, types de tâches, corps de métiers et régions existent.
- National Electrical Contractors Association (NECA). The Effect of Temperature on Productivity: Test Report, 1974.
- Ibid. Recréé par Revay pour une clarté visuelle accrue; veuillez vous référer à l’étude originale comme source de données faisant autorité pour toute application potentielle.
- Brauer, Roger L., Gerald J. Brown, Edward Koehn, Samuel T. Brooks et Thomas Mahon. AFCS Climactic Zone Labor Adjustment Factors, US Army Corps of Engineers, Construction Engineering Research Laboratory, 1984.
- Ibid. Recréé par Revay pour une clarté visuelle accrue; veuillez vous référer à l’étude originale comme source de données faisant autorité pour toute application potentielle.
- Lee, Seulkee. Understanding and quantifying the impact of changes on construction labor productivity: Integration of productivity factors and quantification methods, University of California, Berkeley, 2007, p. 357.
- Koehn, Enno et Gerald Brown. “Climatic Effects on Construction,” Journal of Construction Engineering and Management, 111 (2), 1985, p. 129-137.
- Lee, Seulkee. Understanding and quantifying, 2007, p. 363.
- Abele, Gunars. Effect of cold weather on productivity, Society of American Military Engineers DOD Construction R&D Laboratories, U.S. Army Cold Regions Research and Engineering Laboratory, Hanover, New Hampshire 03755, 1986.
- Ibid., p. 62. [Traduction libre de Revay]
- American Society of Civil Engineers (ASCE), “Identifying, Quantifying, and Proving” 2021, p. 19.
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